Communiqués

Wikileaks – Dossier Dutroux – Journalisme

25/08/2010

25-08-2010

wikileaks A propos de la publication par le site Wikileaks d’une partie des pièces de l’enquête relative aux dossiers Dutroux et apparentés, l’AJP souhaite communiquer les réflexions suivantes :

– Le dossier complet de l’enquête (400.000 pages) avait été mis à disposition des journalistes professionnels, belges ou étrangers, qui ont couvert le procès Dutroux ; la publication de 1200 pages de ce dossier n’est donc pas une révélation de documents inédits ou « cachés », bien qu’ils soient encore couverts par le secret de l’instruction.

– La mise en ligne brute et non expurgée de centaines de pièces et témoignages comportant les noms, adresses, numéros de téléphone, comptes bancaires et nombre de données personnelles, physiques ou psychologiques, antécédents médicaux ou judiciaires, de protagonistes très souvent mis hors cause, mais aussi de victimes majeures comme mineures ou de simples témoins, est inacceptable : elle constitue une violation de leur vie privée, intime ou sexuelle, alors qu’elle ne présente pas d’intérêt pour le public, sauf voyeurisme déplacé. Elle pourrait même se révéler dangereuse pour certains informateurs qui faisaient état de craintes à témoigner. Des dénonciations délirantes y côtoient les pièces « sérieuses , sans que rien ne permette au lecteur de discerner les unes des autres.

– Cette absence totale de sélection, de mise en perspective ou même d’explication des pièces divulguées pose la question de la démarche qui préside à cette publication. On y chercherait en vain un quelconque objectif journalistique d’information du public. On y trouve par contre une preuve de la nécessité et de la valeur d’un véritable journalisme, qui calibre, montre, et contextualise l’information.

– Wikileaks, qui annonce des intentions louables de transparence et a déjà démontré toute son utilité dans d’autres dossiers, doit aussi s’inquiéter des « dommages collatéraux » créés par ses publications brutes. C’est également le sens de la lettre ouverte que Reporters sans Frontières a adressée au site la semaine dernière (à propos des risques encourus par des collaborateurs de la coalition identifiés dans les documents sur la guerre en Afghanistan : http://fr.rsf.org/spip.php?page=article&id_article=38128)

– Enfin, la crédibilité de Wikileaks n’est pas grandie lorsqu’il fait référence au dénommé Jean Nicolas et à son site luxembourgeois : on se souviendra que cet éditeur à sensation avait annoncé en août 2000 la publication de listes de pédophiles présumés, avant qu’une décision de référé le lui interdise. L’AGJPB avait à l’époque condamné ce « naming and shaming » sauvage, animé d’intentions purement mercantiles, en ajoutant dans la foulée : « Livrer en pâture un document brut issu d’un dossier d’enquête, sans contrôle des sources ni recoupement préalable n’est pas du travail journalistique« .

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