Communiqués

Lancement du site Internet « Préserve ta vie privée »

26/09/2010

Une campagne contre la transposition dans le droit belge de la directive européenne relative à la conservation des données


26-09-2010

Protège ta vie privée Une large plateforme d’associations (Liga voor Mensenrechten, Ligue des droits de l’Homme, Ordre des barreaux francophones et germanophone, Orde van Vlaamse Balies, Vlaamse Vereniging van Journalisten, Association générale des Journalistes Professionnels, Orde van Geneesheren en Tik vzw) a décidé de lancer, par le biais du site internet www.preservetavieprivee.be et d’une pétition, une campagne contre la transposition dans le droit belge de la directive européenne relative à la conservation des données. Cette directive européenne, qui devrait bientôt être transposée en droit belge, impose aux opérateurs de télécommunications et aux fournisseurs d’accès internet de conserver toutes les données de communication des citoyens afin de lutter contre le terrorisme et la grande criminalité.

Les associations partenaires ont la conviction que la conservation généralisée d’informations n’apporte pas de solution aux « problèmes de sécurité ». Les organisations déplorent non seulement les ingérences dans la vie privée, mais aussi la remise en cause du secret professionnel des avocats, médecins et représentants religieux et le secret des sources des journalistes. Cette obligation de conservation n’offre en outre aucune garantie contre le terrorisme et la criminalité. Les organisations partenaires invitent donc les citoyens à signer cette pétition.

La transposition par la Belgique de la directive européenne de conservation de données (Directive 2006/24/CE) se concrétise. Cette directive impose aux opérateurs de télécommunications et aux fournisseurs d’accès à internet de sauvegarder les données de circulation et de localisation des utilisateurs afin qu’elles soient disponibles dans le cadre de la lutte contre la criminalité grave. Il s’agit, plus précisément, des données relatives à l’origine, la destination, la date, l’heure, la durée et le type de communication (téléphonique, SMS, e-mail), ainsi que la technologie utilisée et sa localisation. En d’autres mots, on cherche donc à savoir avec qui, quand, pour combien de temps et de quel endroit les individus ont téléphoné, envoyé un SMS ou un e-mail. En outre, les données d’accès à internet sont également conservées, par exemple quand et de quel ordinateur (donc de quel endroit) vous vous êtes connecté à internet.

Cette directive européenne a été adoptée trop rapidement et sans les réflexions et concertations appropriées. Par conséquent, cette directive est critiquée à travers l’Union européenne. Les associations à l’initiative de cette campagne comprennent que la sauvegarde des données relatives au trafic et à la localisation est nécessaire dans certains cas. Par contre, elles ne sont convaincues ni de la nécessité d’une obligation de conservation généralisée ni de la prétendue insuffisance des mesures actuelles, moins draconiennes, telles que le data preservation (la conservation des données de télécommunication pour certains crimes si des soupçons concrets existent et qu’il existe un mandat d’un juge indépendant).
Une obligation de conservation généralisée et préventive constitue une violation importante du droit au respect de la vie privée et part de l’idée que chaque citoyen est potentiellement dangereux.
Elle risque également de porter atteinte au secret professionnel des médecins, avocats et représentants religieux et à la protection des sources des journalistes, ainsi qu’aux activités politiques et toute activité nécessitant légitimement une certaine confidentialité. De plus, la nécessité d’une obligation de conservation généralisée n’a été établie ni au niveau européen, ni au niveau belge. Et de nombreux experts mettent en évidence le fait que cette obligation n’apportera dans la pratique aucune garantie contre le terrorisme ou la criminalité. Par contre, les risques de dérives liés à l’introduction d’une telle obligation de conservation généralisée doivent être pris en compte. En outre, plus pragmatiquement, les coûts inhérents à ces contrôles seront à la charge du citoyen lui-même, via l’augmentation des cotisations auprès des opérateurs et fournisseurs ou au moyen de l’impôt si l’Etat décide de rémunérer les opérateurs et fournisseurs pour ce service.

Les organisations partenaires appellent donc le législateur à ne pas transposer la directive sur la sauvegarde des données et le gouvernement à prendre des initiatives visant à l’amélioration de cette directive, notamment via une évaluation. De manière subsidiaire, les organisations signataires souhaitent encore souligner que le recours à un arrêté royal, via lequel le gouvernement souhaite transposer cette directive, est éminemment critiquable.
En effet, si l’Etat décidait néanmoins de transposer cette directive européenne dans le droit belge, il ne pourrait le faire sans réfléchir sérieusement à la forme sous laquelle il compte introduire cette obligation de conservation. L’avant-projet de loi, dans son état actuel, introduit uniquement le principe de l’obligation de conservation généralisée et préventive. Les autres dispositions d’importance (telles que la liste des données à conserver, les conditions de conservation et la période réelle de conservation) seront réglées par arrêté royal. Les associations à l’initiative de cette campagne considèrent que ces questions ont un impact trop important sur les libertés fondamentales pour ne pas être traitées de façon approfondie au sein du Parlement. Antérieurement, le ministère de la Justice s’appuyait sur la date limite imposée par l’UE (le 15 mars 2009) pour justifier l’urgence du vote. Cet argument ténu qui permettait de contourner les institutions démocratiques et la réflexion de l’opinion publique n’est désormais plus de mise, la date limite étant largement dépassée.
En outre, la récente modification du projet de loi, à savoir la limitation de la conservation des données à une période d’un an plutôt que deux ans (réponse du Ministre de la Justice à une question parlementaire lors d’une session de la Commission de la Justice de la Chambre des représentants, le 1er Octobre 2009), ne répond pas aux critiques fondamentales des organisations, la directive permettant de descendre cette période jusqu’à 6 mois. L’avant-projet de loi va également plus loin que la directive en imposant aux opérateurs et fournisseurs de conserver les informations de payement jusqu’à 1 ans après la dernière communication enregistrée.

Par l’intermédiaire du site www.preservetavieprivee.be, les organisations à l’initiative de cette action souhaitent informer et sensibiliser les citoyens sur la portée et les conséquences de cette obligation de conservation généralisée. En signant la pétition, les citoyens qui le souhaitent pourront exprimer leur inquiétude. La pétition sera ensuite remise aux ministres fédéraux concernés ainsi qu’aux députés et sénateurs qui, en fin de compte, auront la charge d’avaliser ou non cette obligation de conservation généralisée.

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