Communiqués

La protection légale des sources des journalistes satisfait l’AGJPB

17/03/2005

17-03-2005

L’Association Générale des Journalistes Professionnels Belges (AGJPB) se réjouit du vote définitif, intervenu aujourd’hui à la Chambre, de la loi protégeant les sources des journalistes.

Une série de violations du secret des sources journalistiques avait, au cours de la décennie écoulée, rendu cette loi indispensable. Par des interrogatoires, des perquisitions, des saisies, et même des privations de liberté, des auxilaires de Justice ont, à plusieurs reprises, tenté de dévoiler de force les sources d’information confidentielles auxquelles des journalistes avaient recours.

Et pourtant, le droit des journalistes à entretenir une relation confidentielle avec des informateurs constitue un élément essentiel de la liberté de la Presse, en général, et donc également de la démocratie. C’est dès lors sans surprise que la Cour Européenne des Droits de l’Homme de Strasbourg avait condamné la Belgique, à l’été 2003, pour violation de la liberté de la Presse (affaire Ernst et consorts contre la Belgique, arrêt du 15 juillet 2003).

La satisfaction de l’AGJPB résulte du fait que, notamment par suite de ses nombreuses interventions aux niveaux politique et judiciaire, la loi votée ce jour par la Chambre peut être considérée comme un texte assurant une des meilleurs protections légales des sources journalistiques au monde. L’AGJPB est bien consciente du fait, en l’espèce, cette loi est la consécration du travail de plusieurs parlementaires, parmi lesquels MM. Geert Bourgeois et Olivier Maingain à la Chambre, et Philippe Mahoux, au Sénat.


Les lignes de force de la nouvelle loi peuvent être décrites comme suit :

# Non seulement les journalistes se voient reconnaître explicitement le droit de se taire, lorsqu’ils sont convoqués à titre de témoins, mais ils sont aussi explicitement protégés contre les perquisitions, les saisies, les repérages téléphoniques, et autres moyens d’investigation.

# Il est désormais beaucoup plus difficile à la Justice de contourner la loi par des poursuites lancées contre les journalistes eux-mêmes: des poursuites pour recel de documents ou complicité de violation du sercret professionnel par un tiers sont explicitement interdites.

# La Justice ne peut désormais plus forcer le secret des sources que ?pour prévenir la commission d’infractions constituant une menace grave pour l’intégrité physique d’une ou de plusieurs personnes?, et ceci seulement si le renseignement recherché est d’un intérêt crucial pour la prévention de ces infractions et ne peut par ailleurs être obtenu d’aucune autre manière.

# Non seulement les journalistes professionnels bénéficient de cette protection, mais également tous les collaborateurs qui les assistent dans leur tâche.

L’AGJPB exprime maintenant l’espoir que cette loi sera rapidement publiée au Moniteur (elle entre en vigueur dix jours après publication), et que tous les auxiliaires de police et de justice du pays en prendront immédiatement connaissance, tant dans son contenu que dans ses implications.


Loi relative à la protection des sources journalistiques

Article 1er
La présente loi règle une matière visée à l’article 78 de la Constitution.

Art. 2
Bénéficient de la protection des sources telle que définie à l’article 3, les personnes suivantes :
1º les journalistes, soit toute personne qui, dans le cadre d’un travail indépendant ou salarié, ainsi que toute personne morale, contribue régulièrement et directement à la collecte, la rédaction, la production ou la diffusion d’informations, par le biais d’un
média, au profit du public ;
2º les collaborateurs de la rédaction, soit toute personne qui, par l’exercice de sa fonction, est amenée à prendre connaissance d’informations permettant d’identifier une source et ce, à travers la collecte, le traitement éditorial, la production
ou la diffusion de ces mêmes informations.

Art. 3
Les personnes visées à l’article 2 ont le droit de taire leurs sources d’information. Sauf dans les cas visés à l’article 4, elles ne peuvent pas être contraintes de révéler leurs sources d’information et de communiquer tout renseignement, enregistrement et docu-
ment susceptible notamment :
1º de révéler l’identité de leurs informateurs ;
2º de dévoiler la nature ou la provenance de leurs informations ;
3º de divulguer l’identité de l’auteur d’un texte ou d’une production audiovisuelle ;
4º de révéler le contenu des informations et des documents eux-mêmes, dès lors qu’ils
permettent d’identifier l’informateur.

Art. 4
Les personnes visées à l’article 2 ne peuvent être tenues de livrer les sources d’information visées à l’article 3 qu’à la requête du juge, si elles sont de nature à prévenir la commission d’infractions constituant une menace grave pour l’intégrité physique d’une ou de plusieurs personnes en ce compris les infractions visées à l’article 137 du Code pénal, pour autant qu’elles portent atteinte à l’intégrité physique, et si les conditions cumulatives suivantes sont remplies:
1º les informations demandées revêtent une importance cruciale pour la prévention de la commission de ces infractions ;
2º les informations demandées ne peuvent être obtenues d’aucune autre manière.

Art. 5
Les mesures d’information ou d’instruction telles que fouilles, perquisitions, saisies, écoutes téléphoniques et enregistrements ne peuvent concerner des données relatives aux sources d’information des personnes visées à l’article 2 que si ces données sont susceptibles de prévenir la commission des infractions visées à l’article 4, et dans le respect des conditions qui y sont définies.

Art. 6
Les personnes visées à l’article 2 ne peuvent être poursuivies sur la base de l’article 505 du Code pénal lorsqu’elles exercent leur droit à ne pas révéler leurs sources d’information.

Art. 7
En cas de violation du secret professionnel au sens de l’article 458 du Code pénal, les personnes visées à l’article 2 ne peuvent être poursuivies sur la base de l’article 67, alinéa 4, du Code pénal lorsqu’elles exercent leur droit à ne pas révéler leurs sources d’information.

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