Hommage : Jacques Gevers, ou le journalisme de l’exigence et de la rigueur
Victime d’un accident vasculaire, Jacques Gevers est décédé quelques jours plus tard, le 10 septembre, à l’âge de 63 ans. A la rédaction du Vif/L’Express, qu’il dirigea pendant 18 ans, certains d’entre nous l’appelaient affectueusement Big Jack. Non pas que ce costaud, randonneur amoureux de la montagne, fut gros mais en reconnaissance de son autorité naturelle. Il avait du journalisme une très haute conception faite d’exigences éthiques, d’une volonté inébranlable d’exactitude – jusqu’à retarder si nécessaire la parution d’un scoop – et de rigueur dans le fond comme dans la forme, au risque, parfois, de paraître rigide. Le succès de « son » hebdo était bâti sur ces principes, valables pour lui comme pour son équipe. Son éviction brutale décidée sans raison précise par l’éditeur en 2006 n’en fut pour lui que plus injuste et blessante.
Juriste de formation, il peaufinait ses éditos avec un sens aigu de la clarté et de l’argumentation. Et s’il fallait déplaire à certains lobbies (Jacques était un spécialiste du Proche-Orient) ou à son éditeur, il assumait. Il mit ainsi sa démission en jeu pour maintenir ses critiques à l’égard de Baudouin lors de l’interruption de règne. La profession perd un grand bonhomme et l’AJP perd un proche. Jacques Gevers était l’un des cinq jurés du Fonds pour le Journalisme, tâche qu’il remplissait, comme d’habitude, avec rigueur et conviction. (J.F.Dt)